DES SEIGNEURS ET DAMES
ET PROPRIÉTAIRES
DE MEILLANT


Agnès de Charenton ca 1150, dame de Meillant, épouse Raoul de Déols, dont

Denise de Déols +1207, dame de Meillant, cousine et pupille de Richard Cœur de Lion
épouse en 1187 - Salisbury (Angleterre) « Le Preux des Preux » :
André de Chauvigny, croisé lors de la 3e croisade (Célèbre pour avoir combattu Saladin en combat singulier lors de la bataille de Ramallah 6 novembre 1191), chevalier de Richard Coeur de Lion.
(Le cri de guerre des Chauvigny aux croisades était « Chauvigny, chevaliers pleuvent !»),
mère de :

-Guillaume de Chauvigny ca 1188-1233, seigneur de Meillant,
il fonde à proximité du château de Meillant une «Ville Franche». En mai 1211, il donne une charte de privilèges pour les Bourgeois qui sont venus s'y installer ; puis il donne Meillant à son « demi-frère » Louis Ier, comte de Sancerre (tous deux sont fils de Denise de Déols, qui veuve d'André de Chauvigny se remaria avec Guillaume, comte de Sancerre) :

-Louis 1er, comte de Sancerre ca 1200-1268, seigneur de Meillant, épouse (1) Blanche de Courtenay, (2) Isabelle de Mayenne, dame de Loches, dont :

Jean 1er, comte de Sancerre +1280/, seigneur de Meillant, épouse Marie de Vierzon, dame de Menetou-Salon, (8 enfants) dont :

-Etienne de Sancerre +1306, seigneur de Meillant, mort sans postérité, Meillant revient à son frère :

-Jean II, comte de Sancerre ca 1260-1327, seigneur de Meillant, sénéchal de Beaucaire, épouse Joye (Louise) de Beaumetz, dont :

Louis II, comte de Sancerre +1346 à la bataille de Crécy, Connétable de France, seigneur de Meillant, épouse Béatrice de Roucy, dont

Jean III, comte de Sancerre 1334-1402/1403, Conseiller et Chambellan du Roi, (Fait prisonnier par les Anglais à la bataille de Poitiers en 1356. Il se trouva au siège de Tunis en 1390), seigneur de Meillant, épouse Marguerite de Marmande, dont :

Marguerite, comtesse de Sancerre ca 1355-1419, dame de Meillant, épouse Béraud, dauphin d'Auvergne, dont



Marguerite d'Auvergne, dame de Meillant, épouse Jean de Bueil, grand-maître des arbalétriers de France, lieutenant du Gouverneur de la Ville de Paris (1413), tué à la bataille d'Azincourt 25 octobre 1415, dont :

Anne de Bueil 1405-, dame de Meillant, épouse Pierre d'Amboise 1408-1473, seigneur de Chaumont, Chambellan de Charles VII & de Louis XI, Gouverneur de Touraine ; Ambassadeur du roi Louis XI à Rome,


Sacré Coeur de Montmartre, Paris
Statue équestre de Sainte Jeanne d'Arc

Compagnon d'armes de Jeanne d'Arc, seigneur de Meillant où il est décédé, (15 ou 17 enfants) dont :

Charles d'Amboise ca 1430-1481, seigneur de Chaumont, Conseiller et chambellan du roi dès 1463, gouverneur de Champagne 1474, puis Bourgogne 1477, gouverneur de l'Île-de-France, favori de Louis XI, seigneur de Meillant, Sagonne, Charenton-du-Cher, épouse Catherine de Chauvigny,

dont :

Charles de Chaumont d'Amboise 1473-1511, seigneur de Chaumont, Gouverneur des duchés de Milan et de Gênes après 1500, gouverneur de Paris et de la province de Normandie, chevalier de l'Ordre de Saint-Michel, Maréchal de France, Amiral de France, Grand Maître de France, seigneur de Meillant, lieutenant général en Lombardie en 1501, neveu du célèbre cardinal d'Amboise, épouse Jeanne Malet de Graville, dame de Marcoussis, (fille de l'Amiral de France)

dont

Georges d'Amboise ca 1503-1525, seigneur de Meillant, tué à 22 ans à Pavie, donne par testament Meillant à sa tante (sœur de son père) :

Catherine d'Amboise, « Catherine de Chaumont », Femme de lettres, ca 1481-1549, dame de Meillant, mariée trois fois :
(1) Christophe de Tournon, sieur de Beauchastel,
(2) Philbert de Beaujeu, seigneur de Lignières,
(3) Louis de Clèves, comte d'Auxerre, morte sans postérité.
Meillant revient à sa nièce, (fille de son frère Guy d'Amboise, seigneur de Ravel, Grand chambellan de France) :

Antoinette d'Amboise 1495-1552, dame de Chaumont, de Ravel et de Jaligny, dame de Meillant (1542), mariée trois fois :

(1) Antoine de La Rochefoucauld (1471-1537), échanson du roi (1515-1522) puis gentilhomme de la chambre, gouverneur de l'Île de France (1532), Sénéchal d'Auvergne, Chevalier de l'ordre du roi, baron de Barbezieux, chevalier de l'Ordre de Saint-Michel, (portrait par François Clouet) ;
(2) Jean d'Amboise (sans postérité), et
(3) Louis de Luxembourg, comte de Roussy (sans postérité) ;
(Catherine d'Amboise avait transmis à sa nièce Antoinette ses terres de Meillant, Charenton, Lignières et Chaumont en 1542. Cette dernière, ruinée par son « 3ème » mari (Louis de Luxembourg), doit vendre la nue-propriété, le 4 Décembre 1543, à son fils Gilbert de La Rochefoucauld pour « 80.000 » livres et d'autres terres à son autre fils Charles de La Rochefoucauld, seigneur de Barbezieux, pour « 40.000 » livres. Après la mort d'Antoinette d'Amboise, par l'accord du 4 Juillet 1553 avec ses frères, Charles de La Rochefoucauld est resté le seul propriétaire des terres de sa mère) :

Charles de La Rochefoucauld 1520-1583, Gouverneur de Paris, lieutenant-général au gouvernement de Champagne, grand-sénéchal de Guyenne, Chevalier de l'Ordre du Saint-Esprit (1578), Chevalier de l'Ordre de Saint-Michel (1578), Gouverneur de la Ville de Paris (1578), Gouverneur du Berry sous les rois Henry II, François II et Charles IX, baron de Meillant, baron de Barbezieux, épouse Françoise Chabot ca 1528-1605/, (fille de Philippe Chabot, Chevalier de l'Ordre de Saint-Michel, Amiral de France, gouverneur de Bourgogne (1526), Gouverneur de Normandie (1531-1531), Prisonnier de la Bastille, & de Françoise de Longwy, nièce de François 1er) ; dame de Meillant (à la mort de son mari), et dont :

Antoinette de La Rochefoucauld +1627, dame de Meillant, Charenton, Linières, épouse Antoine de Brichanteau 1552-1617,

seigneur de Beauvais, marquis de Nangis, Chevalier de l'Ordre du Saint-Esprit (1595), Chevalier de l'Ordre de Saint-Michel, Amiral de France, Colonel des Gardes-Françaises (1579-1584), seigneur de Meillant,

dont 2 des 9 enfants sont co-seigneurs de Meillant :

-Philbert de Brichanteau, 1588-1682, co-seigneur de Meillant, Prieur du Prieuré Sainte-Catherine de Meillant, duc-évêque de Laon et
-Nicolas de Brichanteau 1582-/1654,

Conseiller d'État, capitaine des toiles et chasses du roi, Chevalier de l'Ordre du Saint-Esprit (1619), auteur de Mémoires, marquis de Nangis, co-seigneur de Meillant, épouse Aimée Françoise de Rochefort (qui apporte en dot la seigneurie de Mareuil avec les forges de Mareuil), dont :

Claude-Alphonse de Brichanteau 1632-1658, Maréchal des camps et armées du Roi, maître de camp du régiment de Picardie, gouverneur des ville et château de Ham, marquis de Nangis, seigneur de Meillant, épouse Anne-Angélique d'Aloigny, dont :

Louis-Fauste de Brichanteau 1658-1690, Maître de camp du régiment royal de la Marine, brigadier des armées du Roi, marquis de Nangis, baron de Meillant, mort le 20 juillet 1690 âgé de 32 ans d'une blessure reçue au-delà du Rhin ; il avait épousé Marie-Henriette d'Aloigny (les époux sont cousins germains), dont 2 fils et :

Louise Madeleine Thérèse de Brichanteau de Nangis 1685-1713, (5 ans au décès de son père), dame de Meillant, épouse Pierre François Gorge d'Entraigues, 1685-1741, + en prison à Moscou, duc de Fallary par le Pape Clément XI, comte de Meillant, morts sans postérité.

Par acte du 12 septembre 1710, le père de Pierre François Gorge achetait aux enfants Brichanteau, pour 214.000 livres, les terres de Charenton-du-Cher, Meillant, Chandeuil et Le Pondy et en donnait l'usufruit à son fils, la nue-propriété devant appartenir aux enfants à naître de son mariage. Il lui donnait en outre la nue-propriété de ses terres de la Chapelle, évaluées 150.000 livres, une maison à Paris, rue de Varenne, prisée 60.000 livres, 1.475 livres de rente et 10.000 livres en espèces. Ces donations étaient faites à charge de substitution, en appelant, à défaut d'enfants,
-son autre fils Chrétien-François, baron de Roise (conseiller au parlement du 28 août 1697, conseiller en la Grand'chambre du parlement de Paris le 21 janvier 1730, doyen, décédé sans postérité en 1737),
-et sa fille Julie Christine Régine, mariée en 1709 à Paul François de Béthune, marquis d'Ancenis, puis 4ème duc de Charost en 1724.

 

Julie Gorge d'Entraigues ca 1688-1737, Dame du palais de la reine Marie Lecszinska de 1725 à 1737, dame de Meillant (en 1732, après rachats et accords avec ses frères), épouse en 1709 de Paul François de Béthune 1682-1759, chevalier de l'Ordre du Saint-Esprit, Pair de France, Maréchal de camp des armées du roi, capitaine des Gardes du corps du roi, gouverneur des ville et citadelle de Calais, Mousquetaire du roi, duc de Charost (4e), duc d'Ancenis (1er), dont :

François Joseph de Béthune, 1719-1739, duc d'Ancenis, épouse Elisabeth de La Rochefoucauld, dont :

Armand Joseph de Béthune 1738-1800, « le Père de l'Humanité souffrante » (enterré dans la chapelle castrale de Meillant),

Maréchal des camps et armées du roi, lieutenant général de Picardie et Boulonnois, gouverneur de Calais, duc de Charost (5e), baron d'Ancenis, seigneur de Meillant (1755), un des grands personnages du Berry, maire du 10e ancien arrondissement de Paris de 1799 à sa mort. Les enfants de sa première épouse Louise de Fontaine-Martel (+1780) sont décédés avant lui, sans postérité (son fils, victime de la Révolution française, à Paris). Il avait épousé (2) Henriette Adélaïde du Bouchet

« dame de Meillant jusqu'à son décès en 1837 ». Elle donne Meillant à sa nièce :

Virginie de Sainte-Aldegonde 1789-1878, (fille de Anne Louise Joséphine du Bouchet), Maître d'équipage de Meillant vers 1840, chassant le lièvre, épouse Casimir de Rochechouart, duc de Mortemart 1787-1875,

Maréchal de camp, capitaine-colonel des Cent-Suisses de la Maison militaire du roi, duc de Mortemart (11e, 1812-1875), prince de Tonnay-Charente (12e, 1787-1812), baron de l'Empire (8 avril 1813), Pair de France, président du Conseil (1830-1830), Chevalier de la Toison d'or 8 septembre 1817, Grand'Officier de la Légion d'honneur 17 août 1822, Chevalier des Ordres du Roi 30 mai 1825, Sénateur en 1852, président du conseil général du Cher, dont :

Alice de Mortemart de Rochechouart 1811-1867, épouse Edmond-Albert de Sainte-Aldegonde 1806-1848, (Edmond-Albert est le cousin germain de la mère d'Alice), dont :

Virginie de Sainte-Aldegonde 1834-1900,

épouse François de Rochechouart, duc de Mortemart 1832-1893, Chevalier de Saint-Jean de Jérusalem, dont le second fils :

Victurnien de Rochechouart, marquis de Mortemart 1865-1939,
épouse (1) Gabrielle Le Coat de Kerveguen 1874-1901, dont

Henri de Rochechouart, marquis de Mortemart 1896-1940, épouse Isabelle Guigues de Moreton de Chabrillan 1897-1938. Mort sans postérité

épouse (2) Jeanne Cousin de Montauban de Palikao 1874-1948, dont :

Victurnien de Rochechouart, marquis de Mortemart 1908-1979, épouse Jeanne de Gaiffier d'Hestroy 1911-2001, dont :

Aimery de Rochechouart, marquis de Mortemart, propriétaire de Meillant.











Armand Joseph de Bethune Charost
,
Le duc de Béthune-Charost, descendant des grandes familles seigneuriales qui avaient donné à la France le ministre Sully et le duc de La Rochefoucauld, fut la personnalité la plus illustre du Berry au XVIIIe siècle. Disciple des philosophes de l'époque, il se fit remarquer par cette passion du bien public, cette sensibilité, cette philantropie qui étaient alors si fort à la mode dans la haute aristocratie. Mais à l'encontre de la plupart des grands seigneurs de ce temps, il fit le bien simplement, sans affectation et ne tira jamais vanité des nombreux services qu'il avait rendus.

Colonel pendant la guerre de Sept ans, il fonda à Francfort, à ses frais, un hôpital destiné aux blessés et aux malades français. La guerre terminée, il rentra dans la vie civile, et s'efforça d'améliorer le sort des populations qui vivaient sur ses terres.

Il possédait des domaines considérables en Berry, en Bretagne et en Picardie. Il y abolit la corvée seigneuriale, les banalités, le droit de minage. (Droit prélevé sur les grains vendus au marché). Il rendit à ses vassaux ce qu'ils avaient payé indûment à lui ou à ses aïeux. Il fonda un hôpital à Meillant, sa résidence préférée, des caisses de secours en cas d'inondation et de grêle à Mareuil-sur-Arnon et à Charenton-du-Cher, des prix pour les cultures nouvelles en Berry : lin, garance, rhubarbe, tabac, plantes fourragères. Il créa une Société d'agriculture à Meillant, installa des fermes modèles, perfectionna la race ovine berrichonne par des croisements avec les mérinos. Il fit construire des forges ; il édifia des filatures munies de jennys importées d'Angleterre. Par ses soins un atelier de charité fut établi à Ancenis. Louis XV disait de lui : « regardez cet homme : il n'a pas beaucoup d'apparence, mais il vivifie trois de mes provinces

À l'Assemblée provinciale, où il n'avait été nommé que tardivement malgré ses mérites, il dressa les projets de canalisation qui ont été exécutés depuis en Berry.

Sous la Révolution, il n'émigra pas et vécut retiré dans son château de Meillant, protégé par sa grande popularité et par l'éclat des services rendus à sa province. Frappé dans ses affections les plus chères par la mort de son fils guillotiné à Paris pendant la Terreur, il se vit bientôt arrêté lui-même, malgré la douleur des habitants, et emprisonné à la Force. Il ne fut rendu à la liberté qu'après le 9 thermidor.

Sous le Consulat, il accepta le poste de maire du Xème arrondissement de Paris. La capitale était alors désolée par une épidémie de petite vérole. Béthune-Charost contracta le terrible maladie en visitant les hôpitaux et mourut bientôt victime de son dévouement.

Abel Tortat, instituteur à Bourges, Edouard Jouin, instituteur honoraire à Bourges, André Redon, directeur d'école à Valençay :
LE BERRY, publié en 1927.

lire une autre biographie dans : Les bienfaits d'Armand-Joseph, duc de Béthune-Charost : (sur le site Gallica) extrait de l'« Histoire du Duché-Pairie de Charost et de la Seigneurie de Mareuil » par L. Cartier Saint-René, édité en 1925.

Armand Joseph de Bethune Charost, auteur de:

-Mémoire sur la navigation intérieure du Berri, par un des membres de l'Administration provinciale de cette généralité, lu à l'Assemblée de 1780... (édité en 1781) ; disponible sur le site Gallica.

-Série de la conduite constante depuis 1789 (et même 1788) tenue par le citoyen Béthune-Charost (Armand-Joseph), paru en 1789, disponible sur le site Gallica.

-Extrait des registres de la Société d'agriculture : rapport fait à cette société [sur les moyens de combattre la mendicité], le 27 mai 1790 ([Reprod.]) / par MM. le Duc de Charost, de Boncerf & de La Noue, paru en 1790, disponible sur le site Gallica.




















Pierre François Gorge d'Entraigues, duc de Fallari

Continuellement en instance d'échafaud ou de potence, pour le public il apparut toujours comme un bandit de haut vol ; pour les Gorge, il fut le châtiment.

Pierre François Gorge embrassa le parti des armes, servit dans la première compagnie de mousquetaires et fut envoyé à Utrecht comme prisonnier de guerre. Libéré sur parole et ne se sentant aucun goût pour les hasards des camps, en 1705 il quitta le service mais non la ville, où le retenaient plutôt des dettes criardes que des amitiés brûlantes.

Avec les 800 écus de la pension servie par son père, il donnait le bal aux dames indigènes, prenait à crédit chez les marchands, bref trouvait moyen de dépenser en dix mois plus de 10,000 pistoles.
Emporté par sa tendresse et redoutant la prison qui menaçait de nouveau son fils, Gorge d'Entraigues garantit la somme, qui fut avancée par M. de Nieuport, le bourgmestre, et semonça vertement l'ancien mousquetaire.

La leçon fut si bien comprise que l'autre répondit par une lettre dans laquelle il manifestait la ferme intention de se faire religieux. Il reprit aussitôt le chemin de la France et, passant par Senlis, s'arrêta trois jours chez les Pères de Sainte-Geneviève, qu'il édifia par ses airs dévotieux.

Leur joie fut complète quand il leur annonça qu'il se rendait à l'abbaye de Paris pour y prendre l'habit ; mais, chemin faisant, il changea d'avis et, après avoir embrassé son père, l'avertit qu'il gagnerait plus facilement le ciel en devenant prêtre et qu'il allait se retirer à Issy, au séminaire dépendant de Saint-Sulpice.

Toujours crédule, Gorge commanda des soutanes et des soutanelles, puis remit au novice 800 écus pour son entretien et celui de son valet. Le séjour à Issy dura quinze mois et se termina par une note de 26,000 livres que le père paya encore une fois : « Excusez-moi, gémit le dissipateur, je m'ennuie trop. Si vous souffrez que je vienne à Paris, je louerai, contre le séminaire, une petite maison d'un loyer de 700 livres, j'y ferai mon ménage et j'aurai la consolation d'assister à tous les offices et prières.
- Soit !
» répondit le candide aïeul, qui envoya immédiatement meubles, tapisseries et vaisselle d'argent dans le nouveau local.

Le 21 février 1708, François Gorge d'Entraigues faisait son entrée au séminaire de Saint-Sulpice, accompagné de M. Cordier, son précepteur pour les études théologiques. L'aridité de celles-ci l'enthousiasma si peu que, soutane relevée sous le bras, il se mit à fréquenter assidûment les académies pour voir monter à cheval, et qu'au bout de six mois il avait vendu le mobilier entier qui lui avait été donné.

Le père trouva la farce un peu forte. Il chargea son fils Chrétien François d'emmener ce bizarre ecclésiastique dans sa propriété d'Entraigues pour examiner de plus près sa vocation, qui ne paraissait pas être bien assise. L'enquête fut d'autant plus courte que la mélancolie le prit et qu'il voulut aller à Claix, en Saintonge, terre qui lui était tombée en partage des biens de sa mère.

Après huit mois de séjour, il devait 10.000 écus, ce qui pouvait passer pour une habitude, en même temps qu'il se posait en vainqueur de toutes les femmes de qualité du pays, ce qui était une innovation malheureuse. Les maris contrôlèrent la conduite de leurs épouses, la reconnurent irréprochable et, devenus furieux, prirent la résolution de faire assassiner ce faux séducteur.
Sans insister le moins du monde, celui-ci décampa, revint à Paris, annonça à son père qu'il voulait se faire capucin, puis, s'apercevant que le mariage l'attirait invinciblement, annonça tout à coup qu'il s'était engagé en Saintonge avec Melle de Nangis.

De prime abord, Gorge ne put en croire ses oreilles. Comment pouvait-il se trouver une jeune fille assez aimante ou assez naïve pour lier sa vie à celle d'un pareil sacripant? Il s'informa. Le fait était vrai.
Louise-Marie-Thérèse de Brichanteau de Nangis, fille du marquis décédé brigadier des armées du roi, avait eu la faiblesse d'engager sa foi sous réserve de l'agrément paternel et maternel. On pense s'il fut vite accordé du côté Gorge !
L'affaire était inespérée par le bien et par les alliances.

Le seigneur d'Entraigues se trouvait si enchanté d'établir son fils et probablement d'en être débarrassé, qu'il se montra d'une noble générosité ; par contrat, il lui donna les terres et baronnies de Meillant et de Charenton en Berry, la seigneurie de Chandeuil, acquise des Nangis, plus le fond et la propriété de la Chapelle, Montaudier et Libernon, le tout évalué 150,000 livres...

Il avait été fait duc de Phalaris par le Pape en raison des bienfaits du cardinal de Valençay (l'un des parents de sa mère) aux ancêtres de Sa Sainteté.

Quelques jours après ses secondes noces, le Duc est arrêté pour dettes et friponnerie et un procès fut entamé contre lui. Il parvint à s’échapper et s’installa en Espagne abandonnant sa seconde jeune femme...(Sa seconde épouse, « la duchesse de Falleri », maîtresse du Régent, lui survécut jusqu'en 1782).
Voir l'ouvrage d'Alfred Marquiset : la duchesse de Falleri.

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Dès le 4 septembre 1716, devant Doyen, son père l'avait déshérité, en révoquant toutes ses donations et fut remis en possession par un arrêt du 1er juillet 1718. Mais, dans l'intervalle, le 11 juin 1717, Pierre-François avait abandonné à ses créanciers l'usufruit de ses terres de Berry et, pour éviter un long procès, son frère Chrétien-François le leur racheta en 1720. Le 8 avril 1721, il fit établir un état détaillé du château de Meillant. À l'abbaye Sainte-Geneviève où il s'était retiré, le vieux Pierre Gorge mourut le 21 mars 1723, instituant pour légataires universels son fils Chrétien-François et sa fille, la marquise d'Ancenis, chacun pour moitié. Après décret volontaire, ceux-ci se firent adjuger la nue-propriété de Meillant et Charenton, pour 80.000 livres, par sentence du 9 février 1732 et, les 18 et 19 avril suivant, devant Desplasses, Chrétien-François vendit à sa soeur la totalité de l'usufruit et la moitié de la nue-propriété lui appartenant. Les Béthune-Charost devenaient ainsi propriétaires du tout.